La semaine dernière, j’ai reçu un livre* par coursier, au bureau, gracieusement offert par un lecteur, mais qui est également auteur de son plein gré, puisque c’est lui qui a écrit le manuscrit.
Tu vois pas que le mec va en plus m’envoyer du Marc Levy pour me séduire, tu m’auras vraiment tout fait !
T’as remarqué comme on rit de se voir si belle en ce miroir de bon matin ?
Bref.
Tu vas me dire que le mec cherche à me draguer. Je te rétorque que tu vois vraiment le mal partout, mais que, pour une fois tu n’as peut-être pas tort même si le susdit Monsieur ne m’a jamais vue. En vrai, je veux dire. Avec ses yeux, donc.Bon, là où je veux en venir c’est que son livre était accompagné de sa carte de visite (personnelle) et dessus y’avait marqué « carte de visite – marque ta page » en rouge, d’une écriture vachement sympa. Pour un mec j’entends.
Tu comprendras aisément que je ne vais point te lire la dédicace.
Non, non, ce n’est pas sexuel, ne te méprends pas. Juste si je commence à te raconter ma vie, on n’est pas rendu, et tu sais prodigieusement que ce n’est pas le genre de la maison, on va tout de suite au coeur de l’info ! Une sorte de lci bloguesque, quoi.
Je ne vais pas non plus te causer du livre, rapport que je n’ai pas eu le temps de le compulser.
Donc, je vais te parler de rien, au revoir.
Sincères salutations (ou cordialement, si tu connais un peu mieux la personne)
Bien sûr, c’est une galéjade ! Mais que tu es con parfois !
Quid du marque-page, j’ai envie de te demander ?En effet, en recevant ce livre, je me suis dit que tu vois pas comme on a l’air con parfois, en cornant les coins des pages comme des gros Beaufs, alors qu’on pourrait accessoiriser le manuscrit d’un über marque-page, histoire de s’élever un peu du commun des mortels et, pourquoi pas, s’en servir comme un moyen de séduction à part entière, dans le métro, dans un café ou même dans ton lit si un inconnu s’y retrouve par mégarde, un soir (tu peux remplacer par un après-midi si tu veux).
Oui, tu viens de comprendre, c’est ça le truc chic et pas cher cette semaine.
A) Les choses que tu ne dois absolument pas utiliser comme marque-page, sinon t’es juste ringard :
– Le billet de train Paris-La Souterraine d’avril 2005 (= je suis provinciale + je suis pauvre)
– Le marque page Hello Kitty avec le pompon rose qui pendouille ( = bonjour j’ai 30 ans mais j’en ai 13 en fait et/ou je suis blonde)
– Le post-it (= je travaille à La Poste, je chourave pleins de fournitures administratives pour compenser mon salaire mais en même temps je mérite pas plus car je ne fous rien + je suis CSP———)
– Le ticket de métro 4 zones Paris-Vesinet Le Pecq (= j’habite en banlieue + j’ai un pavillon + pour se voir le soir y’a pas moyen)
– Une fleur séchée (= c’est chiant t’en fous partout + je suis fleur bleue ascendant culcul la pral’)
B) Les choses que tu dois absolument utiliser comme marque-page, si tu es upper class :
– Le billet d’avion Paris-Miami de la veille (= les voyages forment la jeunesse donc je suis jeune + je suis une executive woman + je suis jet laguée donc assez open)
– La carte de visite d’un homme (= je suis mystérieuse + je suis Isabelle Adjani dans « Mortelle randonnée » + je suis donc fascinante)
– Le carton d’invitation du vernissage de l’expo Nikki de Saint Phalle ( = Je m’intéresse à autre chose que mon horoscope dans Femme Actuelle même si je n’y vais que pour picoler et caresser les animaux empaillés en fin de soirée)
– La photo sépia et jaunie de ton arrière arrière grand-mère (= « La pensée d’un homme est avant tout sa nostalgie« A. Camus + t’es pas née sous X
– Le faire-part de mariage de Mathilde Agostinelli (= je me sape en Prada + je connais Cécilia et son mari)
Si tu es gentil, demain je te causerai de quelle laine Phildar tu dois acheter pour tricoter un pull bleu marine à ton mec, qu’il portera autour du cou, un soir d’hiver, à la Baule.
* Le syndrome de Roch – François Roque
Editions L’Arganier